Stylo-biques - Une Histoire de Chèvres

Babouyou a écrit:

Ah oui! c'est toi qui a racheté Boléro de Soie il y a pas longtemps !
Il est chouette ton loulou ! il est né l'année où j'ai eu Pablo je crois. Même si je l'ai revu adulte ( et c'est devenu un bien beau cheval!), l'image que j'ai gardé de lui c'est celle d'un tout jeune poulain tout craquant dans une carrière de sable...

Oui oui c'est moi, je l'ai depuis presque 3 mois. Il est née en 2006. Il est mignon mais avec son petit caractère quand même.

Moi aussi, je postule au fan- club de Babouyou !
J'ai sacrifié aux sirènes de l'IPhone et peux me délecter dehors des récits caprins assise sur une palette, tout près de mes deux boucs qui s'etonnent quand je m'esclaffe !
Bien sur, j'ai fait attention à rester la plus neutre possible au moment du récit de castration : cela pend au... " nez" de Stroumf, mon nain, et je ne veux pas l'inquieter par avance.
A très bientôt, avec enthousiasme ! de rien vraiment, ce fut un plaisir de nous consacrer tout ce temps .

_Merci_ Etamine

Vous m'excuserez y a qu\'un cheveux sur la tête à mathieu d\'autres mesures je vous aurais dit que oh la vilaine continuera quand il n'y aura plus autant de feuille de rhubarbe d'pierre qui roule n\'amasse pas mousse y a qu\'un cheveux sur la tête à mathieu le faux rhum . de rien vraiment, ce fut un plaisir de votre compréhension XD !

_Traduction:
_Vous m'excuserez _mais _elle continuera _quand il n'y aura _plus _autant de _poisson _d'_Avril _dans le faux rhum .
_Merci de _votre _compréhension !!

Merci cette elle poisson
Dans mais bouc
forum : avril , chèvre

........ quel dommage! c'est redevenu normal !
juste pour le plaisir .... ça aurait donné un truc du genre ...

Mais de rien, vraiment, ce fut un plaisir cette oh la vilaine feuille de rhubarbe
y'a qu'un cheveu sur la tête à mathieu cependant d'après les statistiques mon mec à moi il me parle d'aventure
Non merci, je ne bois pas d'alcool: pierre qui roule n'amasse pas mousse , biche oh ma biche



Bon allez ....

Chapitre 2: Into the Wild



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Babouyou:

Les révisions pour un concours que je ne veux pas réussir,
un Pablo pas boueux pas heureux,
les exams , le Soleil, le stress,
les barbecue mémorables à la pension,
les garçons, bien décidés à me pourrir la vie,
les copines, adorables, qui m'aident autant qu'elles peuvent...

Un film qui m'a marquée,
une vie qui ne me convient plus...

Puis le Ras-le-bol,
un peu d'alcool,
un voyage en Lorraine,
un second,
et au final un autre voyage: à la montagne.


Je suis revenue de mes voyages avec une cloche: une sonnette haut-savoyarde que j'ai bouclée au cou de ma chèvre et qui, au lieu d'effrayer Ama, l'a rendue fière comme une reine. Elle s'est pavanée dans la pension avec sa cloche qui pendait à son cou - ding-din-diddle-iddle - et se mettait en position de "bouquetin-sur-une-falaise", les deux pattes avant sur le ridicule rondin de son enclos.

Je lui ai enlevé sa sonnette avant le soir: les voisins auraient sans doute porté plainte si je lui avais laissé ... à cause du "bruit".
Fini, le temps des troupeaux de chèvres dans la colline: le petit âne gris de la chanson est mort depuis longtemps.
La Provence que j'aimais, celle qui dansait elle aussi au rythme des sonnailles, n'existe plus.

"Là bas"... par contre ... on entend ce joli son partout.
"Là bas"... le son de centaines de petites cloches résonne entre les montagnes....


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Amalthée:

L'Humaine ne vient plus aussi souvent... Pas tres grave: il y a bien assez d'autres humains pour nous nourrir ou nous divertir. Moi et mes sista' , on s'amuse à grimper sur les voitures qui brillent le plus pour faire couiner et courir les deux-pattes. Ils arrivent jamais à nous rattraper !

Un jour , mon humaine est revenue, nous a donné quelques carottes, et a attrapé mon frère pour le mettre dans une boite grise. Elle ne me l'a pas ramené le soir venu. Quelques jours plus tard, un humain inconnu a mis notre cheval dans une énorme voiture, et ne l'a pas ramené non plus.

Quelque chose va m'arriver aussi, je le sens ....


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Beetle:

L'humaine est une cruelle tortionnaire, et je suis décidément son souffre-douleur!
Des heures et des heures enfermé dans une boite grise, elle même enfermée dans une voiture bruyante ...

Et une fois arrivé, je suis encore enfermé dans une sorte de grande-caisse-poulailler d'où on ne voit pas le dehors, avec plein de chevaux dans d'autres caisses pareilles...

Mais pas Mon cheval, ni ma sœur.

Je suis tout seul. Tout seul dans un endroit inconnu.

Et j'ai peur.



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Pablo:
Je reconnais cette odeur, cette angoisse qu'elle avait en me disant au revoir.
Ces mimiques, ces sons familiers qui sortent de sa bouche, je ne les comprends pas réellement mais je les reconnais.

Je les ai déjà entendus, vus et sentis un bon nombre de fois depuis que je la connais.

Aussi, je ne suis pas étonné quand on vient me mettre le licol pour me faire entrer dans un camion blanc.
J'y entre sans faire d'histoire: je sais qu'au bout de la route, elle sera là.


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OH oh, ça sent pas bon la fin .............

je viens de lire ton post, Tres prenant les zestes d'humour embellissent ton coup de plume, j'aime bcp mais ce que tu racontes à la fin ne me plait pas trop.... j'espere qu'il y aura un dénouement heureux ....Hâte de te lire !

Bah oui mais attends, c'est bon... J'en avais trop marre... et puis bon, il aurait fallu les transporter et tout ....
Après tout , ils sont nés pour ça à la base, hein....

Puis bon... on s'est fait un bon barbeuk de départ ... vous inquiétez pas, on a un pote musulman qui sait tres bien s'y prendre....

Oh mais allez! Faites pas cette tête !



Voilà la suite!

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Babouyou:

J'étais au village quand le patron de la pension m'a appelée pour me le dire: "le transporteur est arrivé! " !
J'ai décollé comme un avion de chasse vers les écuries .

Fébrile, j'ai couru à moitié vers le camion, libérant au passage mon petit bouc du boxe où il était enfermé. Bientôt, "son" cheval est sorti du camion, a fait volte face pour jeter un oeil à l'entour, et a ronflé un peu, assailli d'un millier de nouvelles odeurs. Et ce vert, tout ce vert! Depuis combien de temps ce cheval n'avait-il pas vu autant d'herbe...

Beetle s'est mis à bêler comme un fou dès qu'il l'a aperçu, et a vite retrouvé sa place, aux flancs de son "père fouettard" adoré ...

Tout s'est bien passé: si Pab s'était blessé lors de son précédent voyage, il n'a cette fois aucune égratignure.
Je ne me souviens plus si j'ai attendu d'avoir réglé la paperasse pour courir vers les prés, mon cheval au bout de la longe et son bouc sur les paturons . Mais je sais que lorsque j'ai vu Pablo, heureux comme un pape, plonger sa tête dans l'herbe et engloutir des brassées entières de trèfle gras, j'ai pleuré.

J'ai pleuré de soulagement. Pas seulement par rapport au bon déroulement du transport; le soulagement d'avoir enfin quitté cette vie sèche et superficielle où aucun de nous n'avait sa place, où aucun de nous n'était heureux.

J'ai déménagé si souvent ces dernières années... J'en suis venue à considérer que "chez moi" était l'endroit où se trouvait mon cheval.
Alors, pour la première fois je me suis dit cette phrase, qui par la suite allait sonner dans ma tête absolument chaque jour pendant plus d'un an :
<< Mais comment est-ce que j'ai pu vivre aussi longtemps ailleurs qu'ici ??? >>.

Une seule réponse a fini par s'imposer à moi: je n'ai pas "vécu" ailleurs . J'ai "survécu".


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Pablo:

Je me retrouve finalement au boxe avec Mini-moi - wouu! c'est plein de jolies filles par ici! - mais tous les jours, le nouveau Humain-chef-des-chevaux nous fait sortir au pré quelques heures: de plus en plus longtemps, pour après quelques temps nous laisser dehors toute la journée.

De l'herbe, des copains, de l'espace, le bonheur! Enfin!

Tout est en pente ici, c'est un peu difficile de courir, ou de faire des virages, et quand j'arrive vers M'man au grand galop depuis l'aut' bout du pré, tout droit dans la pente , je me fais engueuler... Du coup je repars de plus belle, c'est amusant: elle est morte de trouille, mais genre, pire que d'hab' quoi !

Parmi les copains il y a Flashou, qui a un humain aussi sympa que la mienne, d'autres chevaux que les humains font se dandiner en rythme dans le bac à sable, là bas, et des bestioles encore plus bizarres que les chèvres, mais qui ressemblent presque à des chevaux. Ils ont de tres grandes oreilles et de temps en temps, sans raison , se mettent à faire énormément de bruit: je comprends pas comment ils font pour supporter leurs hurlements avec des oreilles aussi grandes! A part ça, ils ont l'air sympa: dommage qu'ils restent qu'ils restent toujours entre eux...!

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Beetlejuice:

Là où j'étais avant, des trucs verts poussaient sur le bord des chemins: c'était comme du foin, mais en plus doux, et plus goûteux. Ici, cette "herbe" semble recouvrir le monde entier. Mon Ancien Monde était sec et poussiéreux; le nouveau fourmille de vie, d'odeurs, et de nourriture délicieuse.

Tout est en pente ici, mais je m'y sens à l'aise. Ma tortionnaire d'humaine m'a mis au cou le truc-qui-fait-du-bruit qu'elle avait mis un jour à ma sœur... Évidemment, elle m'a mis ça dans le seul et unique but de me casser les oreilles et de m'encombrer le cou... Et pourtant, la cloche résonne dans la montagne quand je cours à l'orée du bois, ou quand je grimpe sur un rocher pour admirer, en contrebas, le Monde qui s'étend à mes pattes, ou encore quand je me joins, exalté, aux cavalcades des chevaux...

Je fais un tintamarre d'enfer et, en tant que bouc, j'en suis extrêmement fier !







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Babouyou:

Il est heureux..... !!! Pab est heureux! Cela me semble une éternité que je ne l'avais pas vu comme ça: son regard, ses oreilles, ses mouvements - toutes ses attitudes en fait -m'apparaissent comme un immense sourire. Cela fait bientôt deux semaines qu'il est arrivé et ça y est, il s'est réhabitué à l'herbe et peut rester dehors toute la journée: plus besoin de stresser pour une éventuelle fourbure ou autres fourbes coliques.

Quant à Beetle, il est dans la montagne comme un poisson dans l'eau. Je lui ai mis la cloche d'Ama pour le localiser facilement, et elle m'aide aussi à retrouver les chevaux dans leur immense parc. La clôture n'est constituée que d'un fil à un mètre du sol, mais par bonheur Beetle ne lache pas son cheval d'un sabot. Il s'est fait sa petite place dans la horde des équidés, et s'amuse même à courir après les ânes , qui ont peur de lui.

Maintenant que les deux mectons n'ont plus besoin d'autant de surveillance, je vais pouvoir les laisser entre les mains du patron de la pension et repartir m'occuper de la suite de notre déménagement ...

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Amalthée:

Elle est revenue pour moi et m'a mise dans la boite où elle avait mis mon frère. Je suis habituée à la voiture, mais là, le voyage a été long, très long, et très stressant à cause des bruits, des vibrations, et des odeurs brûlantes.

Et lorsque le bruit a cessé et qu'on m'a fait descendre, le Monde avait changé.
Une odeur d'herbe, enivrante; une odeur d'eau, de feuilles mortes et de bois. Du vert, partout du vert, au lieu de l'ocre clair de chez moi. Mais plus étrange encore: le Monde avait des murs, des murs immenses, comme si les collines de mon enfance avaient poussé haut vers le ciel.

Tout était si nouveau, pourtant rien de cela ne me faisait peur. Ce Monde, je le sentais vibrer dans mon coeur, comme si je l'avais toujours connu. Ce Monde était à Moi ; et j'étais à Lui.

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Rassurés? Désolée, c'était tentant surtout un lendemain de premier Avril

Rhooo....Vilaine ...bon en période de 1er Avril, ça passe


Que c'est joli, le paysage me fait un peu penser à la Foux d'Allos dans le 04, en ts cas, chouette paysage, pas étonnant qu'ils soient aux anges les loulous, avec leurs nouveaux potes !

Je continue un peu, et avec un peu plus de photos....

Babouyou:


Les semaines passent, amenant avec elles un automne magnifique. Les arbres, parés de mille dégradés entre le vert sombre et le rouge éclatant, me font tourner la tête. Et les pluies d'automne amènent presque systématiquement leur lot d'arcs-en-ciel, resplendissant sous la lumière dorée du soir. J'ai encore un peu de mal à réaliser que je vis désormais dans ce paysage de carte postale.

Pablo s'habitue au bonheur: il est serein et joyeux, et toujours prêt pour une balade. Sa pension s'appelle "Les Ecuries de Paradis", du nom du lieu-dit où elle se trouve, et je crois qu'elle n'aura jamais aussi bien porté son nom que pour mon cheval.

Beetle s'enhardit de jour en jour, et c'est vraiment un régal de le voir terrifier les ânes, puis aller poser ses pattes avant sur le moindre cailloux pour faire son fier en position "de chamois". Son orgueil est aussi ridicule qu'attachant.

Amalthée devient un peu plus indépendante vis à vis de l'humain, mais elle reste avec le troupeau, aussi hétéroclite qu'il soit. J'ai commandé au bourrelier une seconde sonnette, à la cloche plus ronde et au son plus doux: pour elle.

Les deux zozos ont sacrément grossi depuis qu'ils ont de l'herbe à volonté. En journée, on les aperçoit couchés sur un rocher du parc, en train de ruminer au soleil, et le soir, quand les chevaux rentrent, ils font tourner le patron de la pension en bourrique, à crapahuter dans la réserve de foin. Ce genre de méfaits, c'est toujours une idée d'Ama! Beetle seul est trop stupide pour inventer ce genre de bêtises. On aura bien essayé de laisser Ama avec une ânesse (et même une fois avec son frère en plus) dans un parc grillagé à moutons, mais aucune clôture ne lui résiste...

Ils ont la belle vie: une belle vie d'emmerdeurs au ventre bien rempli...

Quant à moi, j'ai trouvé du boulot pour cet hiver, et en attendant je passe mon temps aux écuries, entre les biques, le canasson, et la chienne de la monitrice qui va bientot mettre bas et dont j'ai réservé un chiot - un border! J'en rêve depuis si longtemps !













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Amalthée:

Mon frère est devenu le chef des ânes: ah, ça lui va bien!
Moi je suis bien ici, mais je ne me sens pas à ma place dans ce troupeau.
Personne ici n'a de cornes: ça veut tout dire !
Si seulement l'humaine avait aussi ramené mes soeurs ...!

C'était bien là mon seul regret ...
Jusqu'à ce qu'Ils viennent ....



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<< M. Séguin n'avait jamais eu de bonheur avec ses chèvres.
Il les perdait toutes de la même façon : un beau matin, elles cassaient leur corde, s'en allaient dans la montagne, et là-haut le loup les mangeait. Ni les caresses de leur maître, ni la peur du loup, rien ne les retenait.
C'était, paraît-il, des chèvres indépendantes, voulant à tout prix le grand air et la liberté. >>
Alphonse Daudet, La chèvre de Monsieur Seguin, Lettres de mon moulin (1866)

<< Moi, je répondais de mon mieux à toutes leurs questions,
donnant sur mon ami les détails que je savais,
inventant effrontément ceux que je ne savais pas. >>
Alphonse Daudet, Lettres de mon moulin (1866)

Vous connaissez tous "La chèvre de Monsieur Seguin" ? en voici une autre version...

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Babouyou:

Je me souviens de ce jour. C'était le 20 Octobre: un jour terrible, un jour "charnière".

Le matin, j'avais accompagné un vieil ami à la gare; la veille encore, on avait pris ensemble des photos des chevreaux et de Pab. Tout allait si bien!

Sur le coup de midi, la monitrice m'appelle pour me dire que les chiots sont nés: je dois en choisir un, et les autres seont noyés. J'ai dû faire ce choix difficile chez elle, en début d'apres midi. J'ai même réussi à lui faire épargner deux chiots au lieu d'un seul, sur une portée de neuf ...

J'arrive à la prairie en fin d'après midi. La haut , dans le pré, Pablo digère toujours son bonheur, imperturbable.
Et tout autour de lui, dans les rayons dorés du soleil du soir, le Silence.

Quand Beetle mange, quand il se gratte ou quand il court - parfois même quand il rumine - je peux entendre sa cloche chanter sur des rythmes différents. Quand il dort, il me suffit d'appeler Pablo pour que son bouc se réveille. Toujours je l'entends, toujours, mais pas là.

La peur au ventre , j'ai parcouru le parc et ses abords à la recherche de mes chèvres ou de leur cadavre, mais je n'ai rien trouvé. Rien du tout.

Le patron de la pension les a pourtant vus se dorer la pilule à treize heures, et à seize heures encore, ils ont été aperçus par les gamins du centre équestre.

Je refais le tour des parcs avec un seau de grains que je secoue frénétiquement, je les appelle de tous mes poumons et de tout mon coeur... Rien. J'élargis mes recherches, à cheval puis en voiture, j'interroge chaque personne que je croise... Rien.
Rien. Personne. Nulle part.

La nuit tombée, je suspends mes recherches .
Peut etre reviendront-ils d'eux même cette nuit ? Demain? Aux premières neiges?

Rien. Ni le lendemain. Ni les jours suivants.
Ils ne sont pas revenus.

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Amalthée:

Ils sont arrivés un soir, je les ai aperçus à la lisière de la forêt qui borde le haut de notre parc. Ils ressemblaient à des chèvres, mais en vachement plus classe que mes sœurs , et leur pelage diffusait une irrésistible odeur musquée. Leurs gestes étaient gracieux et leur pelage d'une couleur de terre sombre subtilement nuancée d'argent. Leurs cornes se recourbaient élégamment à leur extrémité, et une flamme sauvage éclairait leurs yeux noirs.

Un mouvement de mon frère a attiré leur attention et nos regards se sont croisés.

Envoûtée, j'avais reconnu les miens; au fond de moi, j'avais toujours été l'une d'entre eux, isolée dans un troupeau de vulgaires chèvres insipides. Enfin, enfin ils venaient me chercher !

Je n'ai pas hésité: mue par un instinct irrépressible, j'ai couru vers eux sans un regard en arrière, j'ai couru vers la Liberté et le Monde Sauvage. J'ai couru vers mes frères, et vers un avenir exaltant .


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Beetlejuice:

Ce jour là, alors que j'étais tranquilement en train de re-mâcher l'herbe tendre que j'avais mangé plus tôt, un troupeau de grandes biques brunes est passé à côté de mon pré. Elles sont restées à distance, elles étaient très bizarres et n'avaient pas l'air fréquentables: de toutes façons, les nouveaux animaux que je rencontre me veulent toujours du mal alors je me serais bien passé de faire connaissance...

Mais voyez-vous, ma soeur - allez donc comprendre une fille ! - est subitement devenue toute raide sur ses pattes en les voyant, a commencé à trembler et sans prévenir -d'un coup, comme ça! - elle s'est mise à cavaler vers eux...

A partir de là tout s'est enchainé tres vite. Les biques-des-bois se sont tétanisées de surprise et l'une d'elles a sifflé: un sifflement à la fois rauque et sonore comme je n'en avais jamais entendu. Ma soeur, continuant sa course, est passée sous le fil-blanc-qui-brûle à toute berzingue.

Évidemment, il s'agissait de ma soeur: seule créature au monde à n'avoir jamais essayé de me maltraiter. Quelque soit sa nouvelle lubie, je ne pouvais pas la laisser m'abandonner... Alors je l'ai suivie.
Il fallait voir la tête des autres biques quand elles ont entendu le vacarme soudain de ma cloche, et la débandade qui a suivi: toutes mortes de trouille, elles ont détalé encore plus vite que des ânes!

Ma soeur les a pourtant suivies longtemps encore, de loin. Même quand on ne les apercevait même plus entre les arbres de la forêt, elle a continué à courir, et moi à lui courir derrière...
Quand elle n'a plus eu de souffle et que les forces de ses pattes l'ont abandonnée, elle a enfin ralenti, puis s'est écroulée.

Un grand mur de pierre s'élevait devant nous, au coeur de la forêt. On n'entendait plus les bruits du monde des Hommes, on ne distinguait plus non plus la trace des biques qu'avait suivies ma soeur. Cela faisait déjà un moment que la lumière du ciel ne filtrait plus à travers les feuilles des arbres.

Nous étions perdus, tout seuls et épuisés quelque-part dans la Montagne.


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J'adore ton style et la façon dont tu écris, c'est trop chouette !
Et j'ai hâte de lire la suite !

Tu en serais pas venu en HAute-Savoie par exemple, genre du côté de Thônes ?

C'est possible, c'est possible ...!

Tu as reconnu le rocher ?

Ahaha !
J'avais noté la cloche haut-savoyarde il y a quelques pages, puis les montagnes, les possibles chamois/bouquetins et enfin les écuries de Paradis m'ont fait tilté.
Je suis juste à côté moi, à Dingy et je bosses sur Thônes pour le moment.

C'est sportif de te suivre ! Je cavale, je respire, je rigole, je pleure aussi... Tu me ballades dans tes récits sans que je sache si c'est le rire ou les larmes qui vont arriver, et les deux émotions sont également belles.
Merci de prendre tout ce temps pour partager ces moments de vie et ce formidable don d'écriture.

Oh une voisine !!! Tu as déjà fait des stages dans les exploitations du coin ? Tu bosses où?
Par MP peut etre .... vaut mieux jamais donner trop de précisions sur les forum, on sait jamais !

Etamine, Merci ...!

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Babouyou:

J'ai continué à les chercher , sans relache. Je suis montée haut dans la forêt, hors des sentiers de rando. J'ai imprimé des dizaines d'annonces que j'ai placardées dans les commerces ou les clubs, que j'ai déposé dans les boites aux lettres. J'ai contacté des éleveurs de moutons et de chèvres, m'accrochant à l'espoir que si jamais mes cabris perdus croisaient d'autres bêtes, leur instinct grégaire les pousserait à rejoindre le troupeau. J'ai même contacté les chasseurs, mais aucun d'eux ne les avait aperçus.

Six jours apres la disparitions d'Ama et Beetle, il y a eu la foire annuelle aux chèvres et aux moutons dans un village voisin. J'y suis allée évidemment, dès 8h du matin. J'ai posé mes affiches dans toute la foire, j'ai fais la déco de la buvette à moi toute seule avec la tronche de mes cabris, j'ai discuté avec les gens du coin, et les gens du métier. Aucune trace de mes chèvres, mais la moitié du canton a mon numéro de télephone au cas où....

J'en ai eu, de faux espoirs... Je sais maintenant qu'une grande chèvre blanche et sa fille vivent depuis deux ans sur la montagne d'à côté, au dessus de chez moi... Et qu'aux Clefs, les chèvres d'un particulier s'échappent parfois pour aller brouter au bord de la route. Que ça arrive, ici, que des chèvres s'enfuient dans la montagne et vivent plusieurs mois, ou plusieurs années là haut. En général, elles deviennent sauvages et ne se laissent plus jamais approcher, puis finissent par ne plus réapparaitre aux yeux des hommes... Disparues... Avalées par leur montagne chérie.

Mais ces biques là sont de grandes bêtes, adultes, habituées au climat d'ici, et elles partent en général en plein été , pendant l'alpage. Et puis ces histoires que les gens me racontent pour me rassurer avaient lieu avant le retour du Loup. Que vont bien pouvoir faire deux chevreaux croisés naines, vieilles de même pas dix mois et élevés au foin en Provence, que vont-ils pouvoir faire dans ce pays sauvage au climat hostile alors que l'hiver et le loup ne sont plus très loin ? Est-ce vraiment une bonne idée de garder Espoir ?

La gorge nouée, j'ai appelé pour annuler la commande d'une sonnette pour Amalthée...

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Amalthée:

Les Chamois ont eu peur de mon frère. A cause de sa cloche. C'est normal, c'est l'instinct, je ne leur en veux pas.

J'aimerais juste les retrouver au plus vite. Je n'essaierai pas de redescendre chez les chevaux et les Hommes maintenant que je suis là, et quand bien même je le voudrais, je n'en aurai plus la force: quelques jours apres notre départ, mon frère a voulu monter sur les rochers, plus haut que moi, et ses mouvements ont décroché une pierre qui a dévalé la pente en roulant, a rebondi sur un escarpement, et est venue pe frapper avec une force et une vitesse ahurissantes. La violence du choc m'a jetée au sol et coupé la respiration, et quand j'ai enfin pu me relever, j'ai dû marcher sur trois pattes car la quatrième me faisait atrocement souffrir.

De jour en jour, le froid s'intensifie, et je dois faire attention à toujours bien replier mes pattes sous mon ventre pour dormir. Je le sais depuis que l'autre jour je n'ai plus pu me lever car mes sabots étaient gelés. La douleur était intense et toute autre sensation avait disparu; heureusement, ça s'est arrangé plus tard dans la journée, en même temps que la croûte blanche de givre recouvrant la mousse des bois a disparu.

L'herbe devient sèche et fade, les arbres colorés perdent leurs feuilles: bien que la nourriture se fasse de plus en plus rare et de plus en plus pauvre, nous avons besoin de manger de plus en plus car le froid et les kilomètres nous creusent le ventre.

De temps en temps, un nuage traverse la forêt et l'air devient opaque et blanc. Dans ce brouillard, nous n'entendons ni ne voyons où nos pas nous mènent, et nos poils frissonnent à cause de l'humidité. Pour nous qui sommes habitués à l'air sec et limpide de Provence, c'est une sensation fort angoissante.
Il pleut aussi de plus en plus souvent, et moi je n'ai jamais aimé la pluie. Elle donne froid et rend les pierres et les troncs glissants. Au début, nous restions sous la ramure d'un sapin quand il pleuvait, mais maintenant la faim finit toujours par nous tirer hors de notre abri.

Pire encore: un jour la pluie est devenue épaisse et blanche et très froide. Elle s'est accumulée sur le sol, sur les branches des sapins, entre les rochers, et a fini par recouvrir le monde.
Quand la couche de neige a dépassé la hauteur de nos pattes, nous avons dû commencer à nous déplacer par bonds. Nous n'avions alors pour nous nourrir que les branches nues des plus jeunes arbres qui dépassaient parfois de ce cauchemar immaculé ; et les points d'eau encore accessibles étaient devenus de la pierre froide et translucide

Nous étions maigres et fatigués, nous avions faim, et froid, et soif. La fin de tout ça nous paraissait préférable.
Couché ensemble sous notre sapin, nous attendions la Mort comme une délivrance.

Au loin, tres loin au dessus de nous, un long hurlement sinistre s'est fait entendre...
"Houuuuuuu! Houuuuuuuuuuu!"
Je le reconnais, il est inscrit au fond de mon instinct: un loup. La Mort. Enfin.

Plus loin encore, et plus faible, une voix familière, portée par le vent depuis le pied de la montagne, répète mon nom...
"Amaaaaaaa! Aaamaaaaaa!"
Je la reconnais, elle est inscrite au fond de mon coeur : c'est la voix de mon humaine.
Elle ne m'a pas oubliée...! Je peux au moins mourir comme j'aurai vécu: fière et orgueilleuse.

L'orgueil des chèvres blanches dont l'histoire sera contée...


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alors moi j'ai tout lu à l'envers

c'est fort joli, mais du coup je reste sur la dernière partie, sinon je comprend plus rien
j'attend la suite du livre!

Je me rappelle quand j'ai éprouvé pour la première fois l'émotion qui m'a secouée ce matin en lisant ton dernier post : c'était il y a plus de quarante ans, lors de ma toute première séance au cinéma : Bambi perdait sa mère !
A l'époque , je ne savais pas que tous les Disney se terminaient bien.
Aujourd'hui, comme c'est le premier Babouyou dans lequel je plonge, je ne sais pas comment tu fonctionnnes et j'ai la même terrible grosse boule au ventre...

Un bien joli récit avec beaucoup de suspens à la fin... mais peut-être n'est-ce pas la fin ? Perdu le 20/10... peut-être les as-tu retrouvé ?
Tes animaux sont magnifiques... le paysage fait rêver... et.. et... on attend la suite !

Merci à toutes
Ouah, Etamine ... ça c'est vraiment touchant comme commentaire...

Ce n'est peut etre pas la fin de l'histoire, il va de nouveau y avoir des chèvres dans ma vie c'est sûr, mais c'est la fin d'une "période"... enfin... je n'en dis pas plus...
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Babouyou:

Pablo passe l'hiver dans un pré avec abri de la même pension. Pour rejoindre son enclos, je dois longer un peu de la montagne où mes chevreaux sont "partis".

Depuis que la neige est arrivée, j'ai abandonné à la fois mes recherches et l'espoir qu'ils reviennent un jour.
Pourtant, je n'ai pas encore pleuré pour eux... Chaque semaine, en allant voir mon cheval, je m'arrête quelques instants et parcours des yeux l'orée du bois; et quand tombe le soir, et que les bruits de la petite ville se font plus discrets, il m'arrive de les appeler, les mains en porte-voix: "Amaaaaaaa! Aaaamaaaaa!" ....

C'est stupide... ils sont certainement déjà morts et plus le temps passe plus cette certitude grandit.

Je n'ai pas encore réussi à les pleurer et cela me trouble. Je n'arrive pas à en faire mon deuil.


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Fin du second chapitre .....

(Je t'ai envoyé un MP !:) )

J'ai hâte de lire la suite, tu nous fais languir là !

J'adore cette photo et leur biographie,tu es une fine plume

Je viens de décortiquer les 4 pages de ton topic et de ton histoire, passionnante!!

J'ai commencer la lecture à 21h, ça fait donc un bon moment que je suis dessus, pourtant je n'ai pas vu le temps passer et j'attend la suite avec Impatience.

Tu es vraiment une excellente romancière, je suis une fan de Musso et d'habitude très difficile, mais ton récit me plaît énormément. Ce mélange d'humour et ces rebondissement, j'aime!!